C'est-à-dire que nos élus n'ont pas de pouvoir
et ceux qui ont le pouvoir de l'institution européenne
ne sont pas élus
Et ça c'est programmé dans la partie 1
Il me semble que ça, ça méritait débat
Le fait que ça n'est pas eu me conduit à penser
que les institutions européennes sont illégitimes
Alors, dans les points dont je voudrais vous parler
parce que je sais que vous en entendrez pas reparler
si je ne vous en reparle pas
il y a ce que j'appelle: "les lois sans parlement"
c'est le point E au milieu de la page
« Les ministres et présidents accumulent
les pouvoirs exécutifs et législatifs
c'est-à-dire qu'ils sont à la fois législateurs
-les ministres-sont à la fois législateurs et exécutifs
sur une série de domaines CACHES au public
Et je peux vous prouver que c'est caché au public
c'est-à-dire que les articles que je vais vous montrer
vous allez voir comme c'est difficile de vous apercevoir
que ce sont des sujets sur lesquels
le Parlement européen-c'est-à-dire vos élus-
sont expressément mis à l'écart
Mais pas clairement mis à l'écart
ils sont expressément mis à l'écart
et je voudrais attirer votre attention là-dessus
Donc, je le lis avec vous
pour être sûr de ne rien oublier
« donc les ministres et présidents
accumulent les pouvoirs sur une série de domaines cachés au public
sous le nom trompeur de - notez bien ce nom-
« procédure législative spéciale »
et c'est l'article 289 du T F U E
c'est au milieu de la page quatre
Voyez, vous avez l'article 289
et vous voyez, j'ai mis en gras et j'ai surligné la définition
le 1/ c'est la procédure législative ordinaire
qui consiste en l'adoption d'un règlement, d'une directive, d'une décision
conjointement par le Parlement européen et le conseil
c'est-à-dire que la procédure ordinaire
c'est que ce n'est pas le Parlement qui fait les lois
c'est pas les gens que vous élisez qui font les lois
ce sont : les gens que vous élisez
accompagnés du conseil des ministres, en colégislateurs
c'est-à-dire que les ministres ce sont bombardés colégislateurs
ils se sont mis colégislateur à côté de vos parlementaires
et JAMAIS, vous m'entendez JAMAIS
dans pas une seule règle
enfin, moi je n'en ai trouvé aucune
dans aucune règle, dans aucun domaine
le Parlement ne peut écrire les lois seules
sans avoir cette espèce de « tuteur » derrière lui
qui est le conseil des ministres
Première chose… Mais c'est pas tout !
Donc déjà le parlement-vous savez déjà-
ça on en avait beaucoup parlé en 2005
le Parlement européen n'a pas l'initiative des lois
c'est-à-dire que ce n'est pas lui qui décide
il ne peut pas décider des sujets
sur lesquels il veut légiférer
c'est-à-dire qu'il peut juste dire oui ou non
sur des sujets qu'on lui présente 2:53
C'est MAJEUR ça, c'est absolument MAJEUR
celui qui a l'initiative,il a une grande partie du pouvoir
celui qui ne veut pas d'une loi
et qui a ce pouvoir d'initiative, et bien il ne la proposera pas
et cette loi dont il ne veut pas
il s'en débarrassera de cette façon
c'est très important l'initiative !
Pour un parlement souverain
pour un parlement digne de ce nom
c'est très important-ce serait très important-
d'avoir l'initiative des lois
Vous savez qu'en France, elle est partagée l'initiative
que le plus gros des lois en France, vient du Parlement
ça s'appelle des "projets de loi"
alors que quand ça vient d'un parlementaire
ça s'appelle une « proposition de loi »
Mais au moins, les parlementaires ont un peu l'initiative
dans les institutions européennes ils ne l'ont PAS DU TOUT
Mais alors, c'est dans l'article 2 qu'on trouve
le début pour comprendre ce que c'est que ce truc
" Dans les cas spécifiques, prévus par les traités
l'adoption d'un règlement, d'une directive, ou d'une décision
donc c'est les trois niveaux possibles
de loi dans l'Europe
par le Parlement européen
avec la participation du conseil
par celui-ci, avec la participation du Parlement
C'est-à-dire que l'un des deux
vous avez compris qu'ils sont deux colégislateurs
et les procédures législatives spéciales
disent : et bien suivant les articles
quelquefois ce sera l'un et pas l'autre
et quelquefois ce sera l'autre et pas l'un
Donc quelquefois ce sera le conseil des ministres qui décide
avec juste l'avis du Parlement
et quelquefois ce sera le Parlement
avec juste l'avis du conseil des ministres
voilà ce qu'on nous dit !
Et ça s'appellera: "les procédures législatives spéciales"
Or, il n'y a pas, il n'y a pas de liste
des sujets sur lesquels c'est le conseil qui décide
avec juste l'avis du Parlement
l'avis… Et puis même s'il n'est pas d'accord
eh bien ça se fera sans lui
parce que c'est juste un avis
Et puis la liste des sujets sur lesquels
c'est le Parlement qui décide
et puis juste avec l'avis du conseil des ministres
Il n'y a pas de liste !
Moi je pose la question :
« Pourquoi est-ce qu'il n'y a pas de liste ? »
Parce que, il faut aller chercher...
alors moi j'ai fait ce travail
on a fait ce travail, on a cherché
une liste de... alors il faut se tartiner des centaines d'articles
de temps en temps vous tombez sur un article et vous dites
à là, j'ai trouvé une procédure législative spéciale
et une procédure législative spéciale
toutes celles que je trouvais, elles sont TOUTES
ce sont des domaines sur lesquels
le conseil des ministres peut décider
avec avis du Parlement
Et je n'ai trouvé aucune procédure législative spéciale
où ce soit le Parlement qui décide avec avis du conseil
Et, je vais vous donner un exemple
pour que vous compreniez comment ça marche ce système
quels sont les sujets, un exemple de sujet sur lequel
on a une procédure législative spéciale
Alors, je vous en ai donné plusieurs
vous en avez un juste en dessous
l'article 153-alors voilà un exemple-
oui, je vous mets entre crochets, au milieu de la page
juste en dessous de ce que je viens de lire
entre crochets : c'est moi qui vous parle
pour un exemple d'acte non législatif
voyez la politique de sécurité
dans la case suivante, à côté
pour les affaires étrangères, c'est incroyable
tout est hors Parlement
le Parlement il n'a pas droit au chapitre
Mais bon, je vais prendre un autre sujet qui est plus social
qui nous concerne plus en tant que salarié
Pour comprendre les procédures législatives spéciales
qu'on devrait plutôt appeler lois sans parlement
c'est le nom que je leur donne moi
parce que c'est plus clair
parce que ça serait plus clair
si on les appelait "lois sans Parlement"
Il faut parcourir un à un
les centaines d'articles des traités
le fait de refuser de présenter la moindre liste
de ces lois sans Parlement
est en soi suspect,pourquoi cacher ces domaines réservés ?
Alors voilà un exemple de procédure législative ordinaire
et de procédure législative spéciale
en matière de politique sociale
les domaines de codécisions entre Parlement et ministres
sont surlignées en gris
et les domaines où l'exécutif légifère seul
sont soulignés en noir
Alors vous avez l'article 153 TFUE
alors ça veut dire que vous vous en êtes déjà tartinés 152
vous attend train de chercher
des procédures législatives spéciales
et vous arrivez sur l'article 153
et où vous trouvez : «En vue de réaliser les objectifs
visés à l'article 151
l'union soutient et complète nanananana
dans les domaines suivants
Est là pour l'instant on voit pas
on voit pas encore que c'est une loi sans parlement
vous allez voir que c'est dans un autre article
que vous allez vous en apercevoir
Et puis vous voyez une série de domaines
Alors vous avez :
a/ l'amélioration aux particuliers
b/ les conditions de travail
donc toutes les lois sur la sécurité sociale
la protection sociale des travailleurs
toutes les lois sur la protection du travailleur
en cas de résiliation du contrat de travail
toutes les lois sur…
Et vous avez comme ça une liste
Bon, vous voyez que l'union soutient
et complète l'action des états
Mais là on voit pas encore que c'était un - on voit pas -
que c'est une procédure législative spéciale
Alors attendez, à quel endroit est-ce que ça se voit...
tac à tac...alors je continue
A cette fin le Parlement
donc je suis à la fin de cette page quatre
2/ A cette fin le Parlement et le conseil
peuvent adopter des mesures destinées à encourager (a/)
b/ peuvent arrêter dans les domaines
visés au paragraphe 1. a/ à i/
par voie de directives, de prescriptions minimales
applicables progressivement
compte tenu des conditions de la réglementation technique
existant précédemment
ces directives évitent d'imposer des contraintes administratives
Et vous voyez que dans les domaines
-troisième paragraphe de la page cinq-
dans les domaines visés au paragraphe 1
.c, d, f et g du présent article
le conseil statue conformément
à une procédure législative spéciale
à l'unanimité, après consultation du Parlement européen
des dits comités
Attendez ! Je ne sais pas si vous voyez le fouillis, le fatras
dans lequel il faut-et l'attention soutenue qu'il faut avoir-
pour repérer que: « Tiens !»
- et là je l'ai mis en surligné noir -
C'est dans les domaines visés
au paragraphe gnagnagna
donc il faut remonter et retrouver en surligné noir
les domaines dont il est question
dans ces domaines là
le conseil statue… Et ça, ça veut dire sans le Parlement
et là on a une procédure législative
où le conseil statue avec un simple avis du Parlement
là, on a sur les points c/ d/ f/ et g/
on a des lois sans Parlement
Alors, qu'est-ce que c'est que ces points là ?
c'est peut-être des points sans importance…
c'est peut-être des points où c'est pas important
que nos élus discutent
et soient capables-publiquement-de débattre
des interventions de l'union européenne sur le sujet
Est-ce que c'est des sujets qui ne comptent pas ?
la Sécurité sociale, la protection sociale des travailleurs
la protection des travailleurs
en cas de résiliation du contrat de travail
Pourquoi les parlementaires n'ont pas droit au chapitre là-dessus ?
Pourquoi c'est les ministres qui doivent décider ça ?
Peut-être que je me trompe…
Je répète que je suis « open » là-dessus
je dis juste qu'on n'a pas eu de débat là-dessus
qu'on arrive pas à avoir de débat là-dessus
Et que ce que je lis, moi je trouve...
ça me plaît pas !
je comprends pas du tout
j'essaye de me mettre à leur place
je ne comprends pas pourquoi, pourquoi
on a mis des procédures législatives spéciales
où ce sont des ministres
ce sont les MINISTRES qui décident
et pas mon Parlement
Attend… Mais ils sortent d'où ces ministres ?
ils ne sont pas élus, comment ils sont arrivés ministres
qui a pris la décision de les mettre ministres
Ça dépend des gouvernements ça
ça dépend des pays
Dans certains pays ils sont pris
en Angleterre ils sont pris parmi les membres du Parlement
Mais en France peut-être...
Comment il s'appelle celui qui est candidat ?
Ça peut être des gens qui n'ont jamais été élus
Ça dépend, ça dépend des pays
ça dépend des circonstances
Mais c'est pas du tout systématiquement des élus
et c'est pas des gens qui rendent comptes devant un Parlement
Dans le cas particulier de la sécurité sociale
ça va être des ministres de chaque pays ?
oui
Il y aura un ministre par pays ?
La décision sera prise à l'unanimité ?
Oui
oui, à l'unanimité on vous dit là
Unanimité des ministres ?
Unanimité des ministres
De chaque pays ?
oui, voilà, sans Parlement !
Enfin, avec un avis des Parlements
Un avis… Après consultation
c'est comment France les ministres ne sont pas élus
Comment ?
les ministres ne sont pas élus
Oui, mais attendez,en France
les lois elles sont votées par le Parlement quand même
Mais vous avez raison de souligner
que le ver était déjà dans le fruit
c'est-à-dire qu'on a déjà des lois sans Parlement en France
Oui tout le pouvoir réglementaire
les décrets, les arrêtés, même les ordonnances
il y a déjà des tas de règles dans la constitution
de la Ve République
qui ferait faire des tours de toupie
à Montesquieu dans sa tombe !
Qui sont la plus totale confusion des pouvoirs
Et d'ailleurs, toutes les régressions
des 20 dernières années du droit du travail
elles ont lieu très largement par le pouvoir réglementaire
c'est-à-dire sans parlement
C'est-à-dire que le pouvoir réglementaire
qui pour moi c'est une aberration le pouvoir réglementaire
Il ne devrait pas y avoir de pouvoir réglementaire
Il faut trouver quelque chose qui permette de décider
dans le menu détail l'application des lois
je comprends ça, je comprends l'objectif
je comprends l'objectif, la justification
si vous voulez, en France, en droit
vous avez la loi qui fixe les grandes règles
et puis l'argument, c'est qu'on peut pas demander
au parlement qui est une assemblée qui discute
on peut pas leur demander de prévoir tous les petits détails
l'application des lois
C'est ça la justification officielle
Mais qui est un mensonge…
parce que c'est bien plus grave
ce que l'on fait avec le règlement
C'est ça la justification officielle du pouvoir réglementaire
du pouvoir qu'on donne-ce qui devrait n'être que l'exécutif-
et qui est en fait le gouvernement
On lui donne un pouvoir
de production de normes obligatoires
sans limitation de durée et aussi grave et dangereuse
aussi dangereuse que les lois
On donne au gouvernement un pouvoir aussi puissant
que le Parlement, avec beaucoup moins de garanties
que la discussion publique qu'il y a au Parlement
avec la possibilité de s'opposer, de discuter
avec la navette avec l'assemblée
enfin tout un débat public
Quand c'est le gouvernement qui décide
dans le cadre du pouvoir réglementaire
c'est beaucoup plus opaque
et il y a beaucoup moins de contres-pouvoirs
il y a beaucoup moins de résistances possibles
Il y a le terreau fertile
d'une infinité d'abus de pouvoir
avec le pouvoir réglementaire
Mais je ne dis pas du tout
que l'on passe du paradis des institutions françaises
à l'enfer des institutions européennes
Je sais bien qu'il y a déjà
que la situation est déjà très grave
dans les institutions de la V (république)
Vraiment méconnu, méconnu
J'ai fait beaucoup de droit constitutionnel
quand je lis les manuels de droit constitutionnel
je ne trouve pas cette révolte
contre le pouvoir réglementaire par exemple
Le pouvoir réglementaire dans les manuels de droit constitutionnel
est présenté comme : « Ben voilà c'est comme ça…,
c'est comme ça, et puis c'est comme ça depuis un moment
depuis 1958, et puis on s'y fait…
Et puis voilà, il y avait des raisons
voilà ce qui a été invoqué
Et puis on passe à autre chose
parce que dans un manuel de droit constitutionnel
est très épais, il y a beaucoup de choses à voir
Je pense que c'est contre l'intérêt général
de donner au gouvernement
un pouvoir réglementaire aussi puissant
Je vous rappelle que dans les institutions de 58
C'est incroyable ! Le pouvoir de la loi
les domaines de la loi sont listés
il y a la liste de ce que la loi peut faire
donc si c'est listé, c'est limité
Est le pouvoir réglementaire, c'est tout le reste
Ça se voit, ça se voit
que c'est De Gaulle qui a écrit les règles
Excusez-moi, je voudrais poser une question
peut-être plus subversive
Si vous avez une panne de voiture
vous ne vous mettez pas à voter
pour décider quoi faire
vous connaissez un expert, un garagiste
qui vous répare votre voiture
J'ai l'impression qu'on attend d'une constitution des lois
de résoudre des problèmes
d'empêcher les gens de mal agir
Comme il y a 2000 ans ou plus
on croyait aux esprits ou à la religion
Vous ne croyez pas que finalement
c'est le comportement humain qui pose problème ?
Est-ce qu'on a besoin de lois
pour résoudre les problèmes humains ?
Moi c'est ce que je pose…
Est-ce qu'on a besoin de représentants ?
Ah, c'est pas pareil !
Moi je parle des lois, des représentants, tous ça
c'est un fourbi finalement qui cache absolument
notre incompétence à gérer les problèmes
Alors je vous signale-je n'ai pas amené ce bouquin-
mais je vous le recommande très chaleureusement
Peut-être il faudrait que je pense à le prendre systématiquement
Il y a, sur la compétence des gens
sur la compétence des humains
et la prétendue, et peut-être réelle
incompétence du peuple
a décider de ses propres affaires
Il y a eu une très intéressante controverse
au milieu du vingtième siècle, entre un gars
qui s'appelait Lippman, qui était un journaliste
de niveau international, une pointure
un cerveau brillante qui discutait
avec tous les grands de ce monde
qui était un libéral endurci
et qui avait un bouquin qui s'appelait
« Le public fantôme »
Qui a été réédité récemment, qui est une merveille
qui est très intelligent, assez déprimant
qui prétend que nous ne sommes pas capables
que personne n'est capable
d'avoir un avis éclairé sur les questions
compte tenu des problèmes qui se posent
Alors c'est important ce qu'il dit
et puis il le démontre
et c'est vrai que c'est très bien argumenté
et on sent, on s'ent que largement il a raison
Mais ce qu'il disait Lippman
il ne disait pas seulement que le peuple était incapable
il disait que les gouvernements AUSSI étaient incapables
que personne d'après lui était capable d'avoir…
De prétendre prendre la bonne décision
Et les interprètes, les gens qui ont suivi Lippman
on oubliaient que Lippmann avait dit
qu'il n'y avait pas que le peuple qui n'était pas capable
il y avait aussi les princes et les gouvernants
Machiavel disait ça, Machiavel disait aussi
que le peuple était tout aussi vertueux que les princes
que les princes étaient pas plus vertueux que le peuple
que les princes n'étaient pas du tout
mieux capable de prendre des décisions
que le peuple
On trouve chez Machiavel
bien autre chose que sa caricature
Je vous recommande vraiment la lecture de Machiavel
c'est beaucoup plus intéressant
que la caricature qu'on en dresse d'habitude
Il cherchait lui aussi le bien commun, c'était très étonnant
Alors bien sûr, il y a des aspects propres à l'époque
qui nous paraissent brutaux
Mais c'est beaucoup plus nuancé
que la caricature qu'on en fait souvent
Mais pour revenir à ce que vous disiez
Donc Lippmann avait écrit ce livre
«Le public fantôme »
défendant l'idée que nous ne sommes pas capables
et c'est complètement lié à mon sujet
j'ouvre la parenthèse parce qu'elle est complètement liée à cette réflexion sur
si on organise une démocratie
est-ce qu'on est capable nous-mêmes de prendre des décisions ?
sur nos problèmes, sur ce qui nous concerne
Et donc Lippmann prétendait que non
Et il prétendait aussi que le représentant non plus
Est un penseur formidable qui s'appelle Dewey (John)
qui était un mathématicien, un logicien
et qui était un théoricien de l'enquête
qui avait beaucoup travaillé sur la compétence des gens
à partir de la méthode de l'enquête
un petit peu comme Socrate conduisait
à progresser par la réflexion sur nous-mêmes
Dewey était confiant dans les vertus de l'enquête
d'une méthode de travail, c'était un matheux, un logicien
pour améliorer notre compétence
Et je trouve…
Alors la controverse entre Lippman et Dewey elle est brillante
absolument passionnante pour nous pour comprend
et puis en plus dans un langage tout à fait compréhensible
c'est pas des mots compliqués
Ces gens-là discutent du bien commun très concrètement
Lippmann dit: « Les humains ne sont pas capables de prendre des décisions »
et donc lui a plutôt tendance finalement
à justifier une tyrannie
un despote éclairé qui sera mieux
Et puis de Dewey dit : " Pas du tout, si l'on se donne les moyens
d'institutionnaliser les conditions d'une enquête véritable
honnête et complète
on va faire monter le niveau des gens
qui vont permettre de prendre des décisions
pas si mauvaises que ça
En complément de cette controverse
entre ces deux points de vue
je voudrais souligner que dans
dans les assemblées tirées au sort
et on a des centaines d'exemples d'assemblées tirées au sort
dans l'histoire des hommes
le tirage au sort n'est pas du toute une nouveauté
on teste le tirage au sort depuis longtemps
je vous parlerai de l'époque athénienne tout à l'heure
Mais aujourd'hui à l'époque moderne
page beaucoup d'assemblée, les jurés citoyens
des sondages délibératifs
toutes sortes d'assemblées
composées du commun des mortels
au juger de sujets techniques
ont existé, et sont un terrain d'observation
un observatoire qui permet de savoir
et donc il y a un livre qui fait le récapitulatif
un florilège moderne qui s'appelle
« Le pouvoir au peuple »
de Yves Sintomer
donc ce livre là je vous le recommande
c'est un livre qui intéresse les citoyens
Parce que c'est l'histoire...
D'abord il y a une bonne partie
de la façon dont les athéniens tirés au sort à Athènes
Donc la procédure qu'ils utilisaient
parce que tous les matins ils tiraient au sort
Est donc il explique comment ça se passait
le tirage au sort tous les matins
est vraiment intéressant !
L'exemple athénien, vous verrez
je suis enthousiaste là-dessus
Et donc Sintomer explique une partie de son bouquin
un petit quart, il explique bien la procédure
mais il explique aussi les expériences
de jurés citoyens, de sondages délibératifs
dans lesquelles on étudie la compétence des gens
on étudie les décisions qu'ils prennent
Et on s'aperçoit finalement
que loin d'être les incompétents qu'on nous promettait
loin d'être les abrutis avinés qui comprenent rien à rien
et qui sont finalement...
qui ne s'occupent que de leur intérêt personnel
au lieu de s'occuper… Et qui sont incapables de s'occuper de l'intérêt général
C'est pas DU TOUT ce que l'on observe
Ce que l'on observe quand on met ensemble des gens
à s'occuper, à parler du bien commun
les gens CHANGENT
Quand on leur donne… Attention...
quand on leur donne le pouvoir
de TRANSFORMER les choses
Si vous vous foutez de leur gueule…
Si vous vous moquez d'eux
-faut pas dire des gros mots-
si vous vous moquez d'eux
et que vous ne leur donnez qu'un pouvoir consultatif
c'est-à-dire que vous allez faire bosser
mais qu'après ça c'est d'autres qui vont décider
C'est sûr que vous n'obtiendrez pas l'effort
on n'attrape pas les mouches avec du vinaigre
vous n'obtiendrez pas d'eux l'investissement
les efforts, l'engagement personnel
qui va les transformer
Parceque que vous ne leur avez pas fait confiance
Moi je suis prof
J'en parle souvent dans mes conférences
parce que vraiment c'est ça qui m'y fait croire
je sais, parce que je le vis
que quant je fais confiance à quelqu'un
il change ! En bien
Et inversement, quand je ne fais pas confiance à quelqu'un
quant je m'en méfie, il change, en mal !
et les gens ne sont pas noirs ou blancs
ils ne sont pas toujours les mêmes
ça dépend des circonstances
et il y a des institutions qui poussent les gens dans le bon sens
et des institutions qui poussent les gens dans le mauvais sens
ce que je prétends,
c'est que nos institutions sont fermées
et qu'elles nous dissuadent de faire de la politique
elles nous dissuadent de nous donner du mal pour le bien commun
et c'est pour ça qu'on a l'air d'être des citoyens passifs
qui se foutent de tout; qui sont individualistes
c'est multifactoriel, il n'y a pas que ça
Mais je pense que le rôle d'institutions fermées
dans cette situation de citoyens passifs
est important.
Je sais que ce n’est pas une panacée ce dont je vous parle
Mais je pense que des institutions
qui seraient plus ouvertes
Qui permettraient aux gens de discuter entre eux
Dans le cadre d’assemblées tirées au sort
Ou partiellement tirées au sort si ça vous fait peur,
On en parlera tout à l’heure
Des institutions qui permettraient aux gens
De discuter et de DECIDER
De décider vraiment
Et donc de prendre le risque de se tromper
Avec la possibilité
Quand on s’est aperçu qu’on s’est trompé
De changer de décision pour modifier
Donc d’évaluation des institutions
Qui permettent d’évaluer les décisions
Et de changer
Ces institutions là si elles étaient ouvertes,
elles nous transformeraient, je prétends ça
Voilà, je…
Et les institutions,... les expériences de tirage au sort
que j’observe dans le bouquin de Sintomer,
Je les trouve enthousiasmantes
parce qu’elles vont dans ce sens-là,
elles montrent que quand une assemblée de maliens,
donc au Mali se réunissent pour…
sont tirés au sort pour parler de n’importe qui,
il y a de tout là-dedans,
il y a beaucoup de paysans parce qu’il y a pas mal de paysans
mais il n’y a pas que des paysans
il y a des gens de toutes les catégories socioprofessionnelles.
Et quand ces gens se réunissent pour parler des OGM,
ils ne connaissent rien des OGM au départ
Et on leur donne des crédits
et pendant des mois ils travaillent là-dessus
Ils font venir des experts de partout dans le monde
ils ont des crédits pour ça
Ils font venir des gens ils font venir des experts
ils écoutent les experts
ensuite ils font venir des experts contradictoires
pour se faire entendre…
pour entendre tous les sons de cloche.
Les entendre publiquement,
tout ça est diffusé à la radio, à la télé, sur internet
Y a les gens, les gens peuvent assister à ces délibérations,
peuvent intervenir, peuvent poser des questions,
peuvent dire vous avez voulu poser cette question
ben on pose la question à Monsanto quand il vient
pour expliquer pourquoi il veut les OGM
ensuite on va écouter les gens de la confédération paysanne
pour savoir pourquoi ils veulent pas passer aux OGM,
ensuite on va écouter les paysans d’Amérique latine
qui sont tous aux OGM en leur disant
« pourquoi vous y êtes passés ?
Est-ce que vous êtes contents d’y être passés»
et on entend tout ça, et après des mois,
des gens qui ne connaissaient rien sont devenus compétents.
Voilà. Et ça c’est enthousiasmant !
C’est-à-dire que les expériences pratiques confirment
ce que je vous dis sur le plan théorique,
c’est-à-dire que les humains sont des animaux politiques
mais pas à tout prix,
c'est à dire que s'il n'y a pas d'enjeu on ne fait rien
parce qu’on n’a pas de raison de le faire
mais si par contre il y a un enjeu et que
si, quand on se donne du mal, ça peut changer les choses, là on le fait
Vous avez vu en 2005, on nous annonçait qu’on n’allait pas discuter des institutions,
que la constitution c’est un texte poussiéreux, ennuyeux,
qui fait chier tout le monde y vont même pas s’en occuper
c’est même pas la peine de faire de référendum taratata
On a eu… Il y avait un referendum,
on a senti qu’on pouvait dire oui, non qu’il y avait un enjeu,
on s’est mis à discuter on a dit on peut changer
mais regardez comme on en a parlé.
C’aurait pu être mieux, ça a pas été assez long,
on n’a pas bien parlé de la partie I à mon avis.
On aurait dû être 80%, 90% à dire non
mais parce qu’on n’a pas eu le débat qu’il fallait.
Je pense qu’il y a plein de gens, des amis,
avec qui j’ai discuté longuement,
qui ont votés oui parce qu’on n’avait pas eu le temps de discuter comme il fallait,
je pense que c’est…
regardez comme ça nous a changé.
Donc, sur la compétence, je pense que nous avons besoin de lois.
Je pense que quand il n’y a pas de loi c’est la loi du plus fort qui règne
et ça me parait moins sympa quand je vois la loi du plus fort.
Elle est partout la loi du plus fort.
Notre régime d’état de droit, est, dans la nature, tout à fait exceptionnelle,
il n’y a que les humains pour faire prévaloir, pour imaginer et faire valoir un état de droit.
Et il me semble que c’est loin d’être parfait
et on verra pourquoi quand on parlera du gouvernement représentatif
qui n’est pas la démocratie.
Mais il me semble quand même que l’on a un outil
qui devrait nous permettre de nous pacifier, de nous protéger
de nous rendre la vie moins pénible
Mais par contre, est ce qu’on a vraiment besoin de représentants,
ça mérite vraiment une discussion.
Des représentants comme on a aujourd’hui
c’est-à-dire des représentants à qui, tous les 5 ans,
on donne tous les pouvoirs sans même pouvoir les choisir
parce que le choix, c’est un faux choix,
les gens pour qui je vote je ne les ai pas du tout choisi.
Je choisis parmi des gens que je n’ai pas choisis du tout !
Cet exemple, c’est un exemple académique de faux choix !
Les exemples qu’on nous présente aux élections
ce ne sont pas des vrais choix, ce n’est pas moi qui ai choisi ces gens là
Et donc, donner tous les pouvoirs,
parce que c’est exactement ça, donner absolument tous les pouvoirs
à des gens que je n’ai pas choisi,
et sans avoir ensuite, dans l’intervalle du mandat,
sans avoir la moindre possibilité de les révoquer,
de les mettre en cause, même de contester une de leurs lois,
sans avoir aucun moyen de…
ça ne me parait pas du tout, du tout, du tout souhaitable.
Mais, ça ça n’est pas la démocratie,
ils appellent ça la démocratie parce qu’ils savent qu'on veut la démocratie.
Et parce qu’ils ont compris, c’est fabuleux,
Mais ça, c’est vachement malin de jouer avec les mots comme ça.
En appelant un régime qui est l’antithèse absolu de la démocratie,
qui est le contraire de… quand vous choisissez vos maitres,
c’est-à-dire des gens qui vont tout choisir à votre place,
ça veut dire que mécaniquement ce n’est pas vous qui allez décider
donc ce n’est pas la démocratie !
Si ce n’est pas vous qui allez décider c’est que ce n’est pas la démocratie.
La démocratie, je suis désolé, c’est une question de définition.
Là, fin on peut en discuter si vous voulez parce qu’on peut discuter de tout
mais, la démocratie, une démocratie digne de ce nom, ce n’est pas le régime actuel.
Le régime actuel c’est le contraire : c’est un régime…,
peut être défendable mais faut pas appeler ça démocratie
Et quand on appelle ça démocratie, on nous englue intellectuellement,
volontairement ou pas, ça m’est égal mais nous nous retrouvons englués
dans une situation dans laquelle nous nommons une situation
qui est problématique du nom de la solution.
On n’arrive donc pas à formuler la solution.
On n’arrive pas à dire « moi je voudrais la démocratie »
parce qu’on nous répond « mais vous l’avez déjà »
« mais gnagnagna tu joues avec les mots »
Il faut faire la grève du mot démocratie pour parler du régime actuel.
Le régime dans lequel nous vivons n’est pas du tout
et n’a jamais été voulu comme une démocratie.
Il est prétendument démocratique depuis le début du 19e siècle
mais il n’a pas été pensé comme une démocratie au départ,
il a été pensé comme une aristocratie élective où on désigne les meilleurs,
où le peuple désigne ceux qui vont choisir à sa place
et les concepteurs du régime actuel qui s’appelle le gouvernement représentatif,
savaient très bien… ils l’ont fait en connaissance de cause,
ce n’est pas par hasard, ils savaient très bien qu’ils n’instituaient pas une démocratie.
Ils voulaient que ça ne soit pas une démocratie,
ils connaissaient la démocratie, ils savaient ce que c’était
et ils n’en voulaient pas.
Et aujourd’hui, nous appelons ce régime démocratie.
Quand on reviendra tout à l’heure à ce qui caractérise une démocratie
et ce qui a permis aux athéniens de faire marcher
une démocratie digne de ce nom
pendant deux cent ans
et ce que ça avait d’extraordinairement séduisant pour aujourd’hui,
vous verrez que, les rouages d’une démocratie,
ça n’a rigoureusement rien à voir avec ce que l’on vit aujourd’hui.
Donc je crois que j’ai répondu à la parenthèse un peu trop longuement mais bon…
Présentateur : Etienne, je vais proposer une courte pause,
on avait dit qu’on ferait un pause à 7h30,
on a pas mal débordé. Pour ceux qui veulent,
il y a de quoi se restaurer, des sandwiches,
des bières, du jus de fruits, de l’eau, etc à côté.
Et on reprend, on va dire à moins dis, moins le quart, moins dix
Etienne : vous vous n’embêtez pas ?
(Rires) (brouhaha)